L'ange de Marseille
De Cyril Carau
Éditions : Sombres Rets
Année : 2008
Pages : 190
Catégorie : Romans policiers / thrillers / espionnage
Temps de lecture : Trois jours
Âge : Dès 14 ans
Résumé : Après le mystérieux incendie de leur bistrot, Ange Saint-Gabriel et Robert Gianotti, deux sympathiques quinquagénaires, aidés de Luigi dit l’Anguille, doivent faire face à une palanquée de problèmes. Mais les trois hommes ne sont pas à cours de ressources et dans leur quête de vérité, de justice et de plaisirs, ils croiseront dans la cité phocéenne, de la Joliette aux Goudes, en passant par l’opéra et la Canebière, des flics ripoux, de charmantes infirmières, un vieux mercenaire, un authentique privé « marseillo-new-yorkais », des politiciens par très clairs, un magnat retiré des affaires, de belles dames en détresse, et même Huguy les bons tuyaux !
Avec l'Ange de Marseille, Cyril Carau s’est efforcé de retrouver cette gouaille typique du Sud, des personnages et des situations haut en couleurs, mêlant le rire au tragique, des galéjades qui flirtent avec l'invraisemblable et des moments de tendresse bons et doux comme la caresse du soleil. L’auteur espère autant amuser, faire rire qu'émouvoir...
Ce polar marseillais, servi frais par Cyril Carau, est à lire sans modération ! Au début de l'ouvrage, on pourra trouver un petit lexique à l’usage des estrangers qui facilitera la compréhension de certaines expressions et termes propres au « parlé marseillais ».
Et à la fin, en bonus, on pourra lire une aventure de Gabriel Darso, un des protagonistes secondaires du roman, dans une nouvelle se déroulant à New-York et intitulée la logique Rhodes.
Source : sombres-rets.fr
Mon avis ( dans le cadre d’un partenariat avec Blog-O-Book ) : Je ne sais que penser après avoir fermé cet étrange roman. J’ai un sentiment mitigé qui se confond entre deux points : un ennui équivoque, mais également une douce appréciation. Comment départager ? Au départ, à la minute où les mots se sont étalés dans mon esprit, je me suis demandée dans quel monde je m’embarquais. Il ne faut point oublier que pour moi, pure québécoise, cette histoire fut un dépaysement complet, notamment à cause du jargon marseillais qui m’a laissée médusée. À chaque paragraphe, je devais filer vers le lexique, les yeux agrandis de surprise par ce patois biscornu et gondolant auquel j’ai eu une certaine difficulté à m’habituer. Par la suite, ce langage m’est devenu familier et n’a plus altéré ma lecture, sinon les quelques jurons français et marseillais. Quant à l’histoire, elle était plaisante, mais sans plus. Deux hommes entichés des sbires de la modernité se voient anéantis lorsque leur bar prend feu soudainement, fruit obscur d’étrangers redoutables. Ces deux hommes dans la cinquantaine vont alors se prêter à une nouvelle existence en formant un cabinet qui offre des soins ésotériques ( ou même implicitement érotiques… ) à de jeunes femmes tout en menant une enquête clandestine avec leurs connaissances sur les hommes qui ont assassiné leur établissement. En outre, un récit dont mon intérêt ne sait pas amouraché autant que je le prévoyais. De ce fait, j’en viens au point qui a suscité mon plaisir pendant cette rocambolesque lecture : l’écriture. En effet, derrière les mots marseillais et les discussions phocéennes, j’ai pris goût à l’écriture de l’auteur qui agit telle une montagne russe, passant de la badinerie aux émotions plus profondes, notamment lorsque le personnage, le narrateur, pense à sa femme défunte. À vrai dire, lors de la conclusion, sa plume a réussi sournoisement à m’arracher quelques larmes au coin des yeux, alors que le ton tragi-comique ne me préparait point à cette triste émotion. Une surprise de taille que j’ai bien appréciée !
J’en viens maintenant aux fameux protagonistes qui parsèment l’histoire. Sur ce fait, ils ne m’ont point égaillée, car il m’est impossible d’apprécier concrètement des hommes qui se vautrent dans l’alcool et dans des projets malfamés qui, si nous creusons dans l’implicite, à des échos pervers, peu importe ce qu’ils en disent. Le narrateur, connu sous le nom d’Ange ( un nom ironique, je trouve… ) a été le seul qui, à quelques moments, m’a touchée, mais exclusivement lorsqu’il évoque les souvenirs de sa femme ou l’amitié qu’il porte pour ses acolytes de toujours. Judicieux, pudique et à l’humour quelques fois ironique, il est le plus authentique des deux confrères, car il sait largement garder ses deux pieds sur terre, preuve de son irréfutable sang froid. Néanmoins, sous son apparence qui peut paraître froide à certains égards, il cache une sensibilité accrue qui nous est dévoilée au moment où il s’enfonce dans ses pensées rétrospectives ou même quand une tragédie survient dans la vie de ses amis. N’empêche qu’il reste un homme dépourvu de sens pour sa santé en se soûlant sans condition, ce qui marque un léger désespoir dans son cœur. Par la suite, il y a Robert, cet expressif Robert et coureur de jupons en prime. Véhément et dynamique, il est plus positif et enjoué que son ami, laissant de côté quelques fois la perspicacité. Amateur de ses compères féminines et bonisseur émérite, ce sont ses côtés qui m’ont particulièrement hérissée, car ce genre d’homme ne m’inspire que la méfiance et le dégoût. Passant outre-mesure, ces hommes carabinés vont nous en faire voir de toutes les couleurs, allant de leur nouvelle compagnie truffée de mensonges jusqu’à leur investigation gorgé de dangers. Leurs autres camarades, à savoir Luigi et le « vieux », l’un technicien rusé et chevronné en la matière et l’autre homme sagace et philosophe, vont eux aussi s’introduire dans le paysage avec leur singulière personnalité.
De cette façon, je n’ai ni apprécié, ni détesté ce bouquin aux saveurs truculentes et marseillaises qui déconcertent quiconque n’a jamais entré dans cet univers. À mon avis, la plume de l’auteur a été la seule chose qui m’a tenue accrochée au récit, nonobstant une histoire qui partait sur une bonne base, mais qui a su tout de même créé en moi quelques ennuis passagers. Ainsi, ce ne fut q’une paisible lecture qui m’a procuré un léger plaisir littéraire, sans toutefois me laisser quelques leçons de moral que j’aime tirer des livres lorsqu’elles se présentent. En ce qui est de l’auteur, je pense peut-être lire une autre de ses œuvres à cause de son écriture prometteuse, même si j’ai quelques appréhensions à l’idée de lire un récit similaire à celui-ci. Or, qui ne tente rien, ne saura rien ! En outre, je remercie beaucoup Blog-O-Book et les éditions Sombres Rets pour cette découverte massaliote.
Extrait préféré du roman : « Je ne vais pas m'appesantir sur nos états d'âme du moment ou les détails secondaires, mais ça nous mangea un peu les couilles de changer du tout au tout notre vie. Ce fut un crève-coeur, quand j'y repense. L'appartement que je quittais, je l'avais partagé avec Jeanne... Ce quartier avait vu naître notre amour, adolescents, et il avait aussi été le théâtre de nombreuses péripéties avec mon ami de toujours, Robert. Ce n'était pas rien, même si on se la jouait costaud. Bien des anecdotes me revenaient en mémoire en longeant la rue de la République jusqu'au Vieux-Port. Le vent sur la mer par exemple nous replongea, Robert et moi, à l'école des pierres plates, quand le soleil revenu nous disait de prendre un bon bain, plutôt que d'abîmer nos culottes sur les bancs du collège. La Joliette, qui avait été l'aube de ma vie, avec ce départ vers l'inconnu, n'en serait peut-être jamais le crépuscule. » p. 45.