Les chambres de bois
Éditions : Seuil
Année : 1996
Pages : 190
Catégorie : Autres romans
Âge : Dès 13 ans
Temps de lecture : Deux jours
Résumé : Une jeune fille, Catherine, au cœur ardent, aux songes enfantins, s’éprend d’un jeune pianiste, Michel, qui habite dans une demeure pleine d’ombre et de souvenirs. Elle va épouser cet être froid, distant et fou. Elle qui est simple et avenante, suivra cet adolescent vieilli dans ses propres rêves et dans le désordre de sa vie. Mais Catherine ne peut faire partie de l’univers étrange de Michel et de sa sœur Lia qui vient, entre deux passions, traîner ses cigarettes et ses colères dans l’appartement des jeunes époux. Et Catherine fuira ces pièces aux boiseries étouffantes pour retrouver le soleil et la vraie jeunesse innocente. Réussira-t-elle enfin à échapper des mains glacées de Michel pour connaître des joies familières dans la chaleur d’un amour quotidien ?
Source : renaud-bray.com
Mon avis : Je ne sais que dire de ce roman qui m’a laissé une sensation étrange et fugitive. Cette lecture fut rapide, trop rapide, et je dois avouer que les bribes de la vie de Catherine m’apparaissaient comme un voile embrumé avec pour seule lumière la plume d’Anne Hébert. Oui, car la seule chose que j’ai apprécié du bouquin, ce fut l’écriture lyrique de cette auteure québécoise qui transformait à l’occasion ce livre en une prose légère et profonde, non sans atténuer le brouillard de l’histoire, mais au moins en la rendant plus captivante qu’elle ne l’était au départ. Effectivement, l’histoire était parfois absurde ou limpide, chevauchant entre les émotions abyssales ou le stoïcisme complet. Je n’arrivais pas à voir l’horizon du récit ou à saisir la personnalité de Michel. Ce que je ne doute pas est sûrement la force des sentiments, car l’auteure manie à sa façon la description des bouleversements intérieurs et grâce à elle, l’entrée de jeu est léger, sans difficulté. Les descriptions sont délicates, poétiques, mais je n’arrivais pas à m’accrocher au récit qui tournait autour de Catherine, cette adolescente qui a quitté sa maison et ses sœurs pour habiter avec un jeune homme prisonnier de son être et de sa mélancolie. La monotonie, le manque d’amour, qui se profile depuis les prémices du roman, seront les martyres de cette jeune femme qui devra un jour faire un choix : quitter cet homme fantomatique et sa belle-sœur maussade ou rester cloîtrée dans cet appartement sans vivacité. Le choix fait, elle s’offrira enfin au bonheur qu’elle convoitait si ardemment. Par conséquent, j’ai dévoré les formes d’écriture et les descriptions théâtrales de chaque geste anodin tandis que le récit m’a donné un goût amer dans la bouche, comme si je n’étais point assouvis de l’intrigue.
Les personnages sont les plus intrigants, notamment Michel, un homme atrabilaire et abattu, un musicien désabusé qui vit au sein d’une solitude austère. Dès sa rencontre avec Catherine, même s’il dit le contraire en la demandant en mariage, il ne dévoile aucun signe d’amour à son égard et lorsqu’ils déménagent à Paris, il devient son gardien de prison, l’obligeant à rester et à ne jamais sortir de la maison. Il se lamente constamment, piquant à l’occasion de légères colères et pleurant la crainte de la voir l’abandonner. D’après quelques allusions, sa jeunesse n’a pas été heureuse, sans doute dénuée d’amour, et c’est pourquoi sa personnalité se présente avec une telle lypémanie. Même si j’ai eu quelques pitiés à son égard en le voyant autant s’effondrer dans ses idées noires, je n’étais point capable de m’attacher à ce personnage dont la vie et lui-même ont fait de lui un spectre. Catherine sera la victime de sa solitude dès les premiers instants et par force d’amour, elle décidera de quitter sa chaumière en laissant ses sœurs et son père sans nouvelles. Toutefois, sa tendresse jamais assouvis s’effacera au fil du temps et l’isolement obligé sera un fardeau trop pénible pour elle. Sa santé en prendre un coup et par les soins de sa bonne servante, malgré son caractère un peu dur, seront un nouvel éveil intérieur qui l’obligera à faire un choix qui lui apportera enfin tout l’amour dont elle rêvait. Pour finir le tableau, il y a également la sœur de Michel, Lia, une jeune femme à la personnalité insoumise et aux paroles tranchantes qui viendra s’installer dans leur appartement, un tourment de plus pour la pauvre Catherine. Cette sœur se rapprochera inévitablement de son frère et tous les deux porteront tout d’un coup une indifférence intolérable à la jeune femme. Cependant, sous le caractère revêche de Lia, il y a de la tristesse qui croît dans son cœur et elle le démontrera à l’occasion, mais en quelques infimes minutes. Les drames du passé ont souvent le tour de changer leurs victimes…
De ce fait, ce fut une lecture un peu ordinaire en ce qui est du récit, mais par contre ce fut également une illumination puisque j’ai découvert une plume qui ne me rend pas indifférente. Je conseillerais ce roman simplement pour la sensibilité qui s’y délivre et pour la poésie de l’écriture, car l’histoire ne m’a rien apporté de nouveau, mis à part le talent de l’écrivaine québécoise qui l’a pondu. J’espère secrètement que ses autres œuvres seront davantage captivantes que celui-ci et je sais que Les chambres de bois n’a pas été l’un de ses bouquins les plus estimés. Ainsi, je pense qu’il serait préférable de choisir un autre de ses livres pour faire rencontre avec sa plume, tel Kamouraska, lequel fait partie de ses œuvres notoires. Mais lancez-vous, sa plume est bellissime !
Extrait du roman : « Mais, tout le jour, elle s'appliquait à devenir ce que Michel désirait qu'elle fût. Elle apprenait des fables et des poèmes par coeur. Cela lui tenait compagnie durant le silence des longues heures penchées sur la toile et le lin. Et parfois, fables et poèmes, en leur vie possédée, crevaient comme des veines de couleur, au milieu des plus blanches broderies. »